BAUR André, Odette, Pierre, Myriam, Antoine, Francine (NR)

Francine (Brigitte, Lia) naît le 22 juin 1940 à La Baule au pavillon Broca, avenue Pavie. [Père : André (Léopold) né le 18 mars 1904 à Paris (8ème arrondissement) et Mère : Odette KAHN née le 29 octobre 1910 à Paris (16ème arrondissement)]. Elle est la dernière de la fratrie. Son frère ainé Pierre (Emmanuel) est né le 16 mars 1933 à Paris (16ème arrondissement), la deuxième Myriam (Fanny) née le 29 juin 1934 à Paris (même arrondissement) et Antoine (Charles, Joël) est né le 14 septembre 1937 à Paris (même arrondissement).

Pavillon Broca Avenue Pavie/Avenue Isabelle

La famille en août 1939 vient passer ses vacances Villa La Véga avenue des Nébuleuses à La Baule et est annoncée comme tel dans l’hebdomadaire La Mouette du 6 août 1939. Elle est accompagnée par le frère d’André et son épouse, Marcel et Denise BAUR.

de gauche à droite : Myriam, Antoine, André, Pierre, Odette et Francine [CDJC]

Le culte israélite est organisé dans la villa où logent les deux familles BAUR, celle d’André et d’Odette et celle de Marcel et Denise.

La Mouette 05 août 1939 p.4 [ADLA, presse en ligne]
La Mouette 05 août 1939 p.4 [ADLA, presse en ligne]

A l’entrée en guerre, André est mobilisé sous le grade de Maréchal des Logis Chef (Il recevra la Croix de Guerre pour la campagne de 1939-1940) et Odette met au monde la petite dernière sans la présence de son mari toujours aux armées le jour de l’arrivée des troupes allemandes à La Baule. La famille a déménagé pour loger Villa Castel Maud boulevard Darlu.

Dans le même temps, Denise BAUR toujours présente à La Baule en juin 1940 exerce la mission de délégué auprès du Comité d’Assistance aux Réfugiés pour le secteur de la presqu’île, celui sur Nantes étant André SEXER. Le CAR créé en juillet 1936 dont le siège se trouve 44, rue de Lisbonne puis en juin 1939 au 60, rue Jouffroy à Paris (13ème arrondissement) subventionné sur dons personnels de ses membres et par le JOINT (American Jewish Distribution Comitee ou JDC) vient en aide aux nombreux réfugiés juifs d’Allemagne ou d’Autriche ou toutes autres nationalités. Louis BAUR, un autre frère d’André, en est un des trésoriers. Ainsi Denise informe le CAR des actions entreprises auprès des personnes dans les communes du littoral dont les familles KOMORNER, WITTKKOSKY, FEINGOLD, AMRAM

La famille rejoint son domicile principal à Paris au 8, rue Alfred Dehodencq, dans le 16e arrondissement (date inconnue).

Le rôle d’André BAUR durant la période 1940-1943 :

Fils d’un banquier juif très engagé dans la vie communautaire juive à Paris, il est le neveu du grand rabbin de Paris Julien Weill, mais aussi du secrétaire général du Consistoire de Paris, Albert Manuel et du professeur de médecine Benjamin Weill-Hallé. On lui connait également des liens de parenté avec l’industriel André Citroën et au juriste Raymond Lindon. Lui-même banquier et président de l’Union libérale israélite (synagogue de la rue Copernic à Paris), André Baur est très sensibilisé à l’étude des textes religieux juifs et au militantisme sioniste (il occupait aussi trésorier pour la France du Fonds national juif- Keren Kayemet le Israël).

André Baur est resté à Paris sous l’Occupation avec son épouse et ses quatre enfants, Il noue alors des relations de confiance avec le Comité des Juifs immigrés de la rue Amelot. A la mi-mars 1942, confronté à une demande du SS Dannecker d’assurer le ravitaillement du premier convoi de déportation prévu en France, André Baur proteste dans une lettre adressée à Xavier Vallat daté du 26 mars 1942.

Le 29 mai 1942, il écrit au président de la Croix Rouge française pour lui demander des informations au sujet des Juifs déportés à Auschwitz, afin de leur apporter un soutien « moral et matériel ». Informé de l’imminence de la rafle du Vel d’Hiv, il transmet l’information aux responsables du Consistoire central à Lyon, par l’intermédiaire de son frère vivant en zone sud. Il rencontre alors Marcel Stora et les responsables du Comité Amelot le 13 juillet, les informe de l’imminence de la rafle et leur propose de fournir des documents de protection à leurs employés. André Baur s’est rendu au Vel d’Hiv pendant la rafle des 16 et 17 juillet pour y constater l’état d’abandon des familles raflées.

S’efforçant de faire face aux besoins d’assistance de la population juive de zone nord, il entretient une correspondance régulière et détaillée avec son oncle Albert Manuel, devenu secrétaire général du Consistoire central à Lyon. Au début de 1943, il mène une négociation difficile avec les Allemands pour préserver le personnel étranger de l’UGIF Nord. Il Effectue en février 1943 un voyage de deux semaines en zone sud avec son secrétaire Armand Katz, dans le cadre d’un projet de réorganisation nationale de l’UGIF. Le 28 avril, à Grenoble, il participe à la réunion constitutive du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC).

Le 11 juillet 1943, Baur demande à rencontrer Pierre Laval pour s’opposer à la politique brutale menée par le SS Brunner au camp de Drancy. Le 21 juillet, l’évasion de deux internés de Drancy, dont l’un est le cousin d’André Baur, sert de prétexte à Brunner pour arrêter ce dernier. En réalité, c’est son indocilité, manifestée par ses démarches au plus haut niveau des autorités françaises, qui semble est la raison réelle de son arrestation. Malgré des demandes de libération faites en sa faveur par le grand rabbin de France, le président du Consistoire central, le président délégué de l’UGIF, et même par Louis Darquier de Pellepoix, André Baur est déporté vers Auschwitz, par le même convoi que Marcel Stora, Fernand Musnik, le rabbin Elie Bloch et la famille de ce dernier.

source : https://www.memorialdelashoah.org/archives-et-documentation/quest-ce-que-la-shoah/personnages-cles-de-la-shoah.html?lettre=b

André est donc interné comme otage à Drancy le 21 juillet 1943, ce qui est par ailleurs précisé dans les circonstances de l’arrestation dans son dossier de la DAVCC.

Selon la déclararation de Marcelle KAHN, mère d’Odette, Odette vient prendre des nouvelles à Drancy de son mari. Elle retourne à son domicile escortée et est arrêtée avec ses quatre enfants puis l’ensemble de la famille est internée à Drancy le 10 septembre 1943.

Placée en catégorie C4 à Drancy (personnes attendant l’arrivée prochaine de leur famille encore en liberté), la famille est placée en catégorie B (immédiatement déportable) et est déportée par le convoi n° 63 du 17 décembre 1943.

Odette 33 ans et ses quatre enfants Pierre 10 ans, Myriam 9 ans, Antoine 6 ans et Francine 3 ans et demi ont été gazés à l’arrivée lors de la sélection sur la rampe d’Auschwitz.

André a été sélectionné pour rentrer dans la partie concentrationnaire d’Auschwitz et est dirigé sur le camp de Monowitz (situé près de l’usine IG Farben). Selon les docteurs HOREAU, HOLITZ et HIRSCH, André a été envoyé à la chambre à gaz en mars 1944. Selon un certain lieutenant BORIS, André BAUR membre de l’UGIF (sans précision de date de naissance) aurait été « exécuté par gaz le 21 janvier 1944« .

Les demandes de statuts de déportés politiques seront déposées par Macelle KAHN mère d’Odette après-guerre et des feuilles de témoignage seront déposées auprès de Yad Vashem par des membres de la famille en leur mémoire.

Un mémoire de maîtrise sera rédigé par Laurent TAUPIN sur André BAUR en 1995 à l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris 1).

sources : CDJC/Memorial de la Shoah, Paris, France ; Division des Archives des Victimes des Conflits Contemporains, Caen, France ; Archives Nationales, Pierrefitte-sur-Seine, France ; Archives Départementales de Loire-Atlantique, Nantes, France ; ITS Bad Arolsen, Allemagne ; Yad Vashem, Tel Aviv, Israël .

FAINSTEIN Samuel, Anna, [Fanny, Denise], Maurice (NR)

Présent en France depuis 1906, Samuel Meyer dit Marcel FAINSTEIN est né le 05 septembre 1894 à Navahroudak [Nouvogroudok] (Biélorussie) [Père : Daniel FAINSTEIN et Mère : Basia VOLFOVITSCH]. La ville de Navahroudak est intégrée à l’empire russe à la fin du XVIIIème siècle et Samuel se retrouve donc réfugié russe lorsqu’il arrive en France. Il est détenteur d’un passeport NANSEN. Il est marié avec Anna Gabrielle [prénom usuel Anna] ZLOTOYABKA née à Paris (1er arrondissement) le 11 février 1889 [Père : Elias ZLOTOYABKA, casquettier et Mère : Fanny KANIGSBERG, fleuriste]. Ils se marient à Paris (3ème arrondissement) le 28 décembre 1911. Les parents de Samuel sont absents ainsi que la mère d’Anna, décédée au moment de leur mariage et ils résident respectivement dans le 3ème et le 12ème arrondissement mais vont s’établir dans un premier temps rue des Tournelles dans le quartier du Marais à Paris [1914] puis au 50, rue du Rendez-Vous à Paris dans le 11ème arrondissement près de la Place de la Nation [1939]. Le couple a trois enfants : Fanny née le 02 novembre 1912 [Paris, 11ème arrondissement], Denise née le 10 septembre 1914 [Paris, 3ème arrondissement] et Maurice né le 18 mai 1920 [Paris, 12ème arrondissement].

Bulletin de mariage de Marcel FAINSTEIN et Anna ZLOTOYABKA [DAVCC 21 P 448 365]
Bulletin de mariage de Marcel FAINSTEIN et Anna ZLOTOYABKA [DAVCC 21 P 448 365]

Acte de naissance de Anna ZLOTOYABKA, Denise FAINSTEIN, Fanny FAINSTEIN et Acte de mariage des époux FAINSTEIN [Archives Municipales de Paris, en ligne]

Samuel FAINSTEIN exerce la profession d’horloger et son activité réside essentiellement dans la réparation des montres et horloges et également dans la vente d’articles de fantaisie en bijouterie/horlogerie.

Dossier d'Aryanisation [Archives Nationales AJ38/4597 dossier n°2524]
Dossier d’Aryanisation [Archives Nationales AJ38/4597 dossier n°2524]

La famille arrive le 14 mai 1940 à Pornichet en provenance de Paris (50, rue du Rendez-Vous, 12ème arrondissement) et Samuel va ouvrir un atelier d’horlogerie le 27 juin 1940 au 139, avenue de Mazy dans le centre qu’il loue en meublé à Monsieur ROUX.

139, avenue de Mazy PORNICHET
139, avenue de Mazy PORNICHET

Tout étranger se déplaçant dans une commune doit signaler sa présence et faire viser sa carte d’identité. C’est ce qu’il fait en mai 1940.

Visas étrangers [Archives Municipales de Pornichet 4H45]
Visas étrangers [Archives Municipales de Pornichet 4H45]

Alors que les Juifs sont 1er et le 20 octobre 1940 suite à la 1ère ordonnance allemande, il ne le fait pas mais va déclarer son commerce le 11 novembre 1940.

Un administrateur provisoire est nommé en la personne de Gabriel HERVOUËT (28 janvier 1941), arbitre de commerce à Saint-Nazaire, les scellés sont apposés sur le magasin le 03 décembre 1940, un inventaire est dressé le 10 du même mois et une affiche « Entreprise Juive, Judische Gesellschaft » est apposée sur la devanture. Alors qu’il ne peut plus en tant que Juif être en contact avec la clientèle, il va malgré tout continuer à expédier les affaires courantes et finir les réparations engagées.

Samuel FAINSTEIN est arrêté le 21 juin 1941, incarcéré et passe en jugement devant le tribunal de guerre. Les autorités allemandes somment les autorités françaises de divulguer les noms des personnes qui peuvent témoigner devant le tribunal allemand que son commerce était encore ouvert alors qu’il aurait dû cesser toute activité, les autorités françaises s’exécutant deux jours plus tard. Samuel FAINSTEIN a été dénoncé par Mélanie TARTOUE, employée de commerce à Pornichet qui réside La Ville Heriou et par Narcisse NIVELEAU, commerçant, avenue de Mazy, la même rue où est établit le commerce de Samuel et qui tient le Bazar de l’Océan.

[La famille ignore après-guerre que Samuel FAINSTEIN a été arrêté sur dénonciation pensant que celui-ci l’a été suite à la déclaration de guerre entre la Russie et l’Allemagne. En effet les ressortissants russes (juifs ou non) sont effectivement arrêtés mais à compter du 30 juin 1941].

Courrier du Préfet de Loire-Inférieure au Conseiller Supérieur d’Administration Militaire (Docteur Schuster, Nantes) du 30 juillet 1941 [ADLA 1694W26]

Les marchandises du magasin sont vendues à Monsieur THUREAU en juin 1941, son voisin d’en face, commerçant au 136, avenue de Mazy au prix de 300 francs alors que le stock était évalué à plus de 1800 francs. Le commerce sera par la suite loué directement auprès du propriétaire  par Monsieur BREDELOUX, artisan-horloger qui habite « Châlet la Colline », avenue Thiriat à la Baule.

Cette dénonciation va avoir des conséquences catastrophiques puisque Samuel FAINSTEIN, arrêté le 21 juin 1941 est transféré au camp de Compiègne. Il est le premier à être arrêté sur l’arrondissement de Saint-Nazaire.

Au mois de juillet 1941, son père ayant été arrêté, Maurice FAINSTEIN, son fils, qui exerce également la profession d’horloger, est sommé d’arrêter toute activité et sollicite auprès de la préfecture l’autorisation de terminer les travaux d’horlogerie en cours ce qui lui est accordé.

Il  se rend à Arcachon vers le début du mois de juillet 1941 avec sa mère et sa soeur Denise, Villa « Jean-Marie » avenue des Abatilles (Basses-Pyrénées) [Archives Nationales, dossier aryanisation du commerce, lettre du commissaire spécial de Saint-Nazaire du 20 août 1941].

Son nom est inscrit sur le registre des cartes de ravitaillement de la mairie de Pornichet mais il  ne vient pas la récupérer.

Maurice FAINSTEIN rejoint Paris au 8, rue Fernand Foureau dans le 12ème arrondissement puis passe la ligne de démarcation et se rend dans le sud de la France à Nice et habite au 9, rue Rouget de l’Isle. Il intégre de le mouvement de Résistance « Libération à compter de novembre 1942. Il participe à l’attentat contre un garage occupé par les troupes italiennes, à un attentat contre le siège du journal du PPF de Jacques DORIOT, ‘lEmancipation Nationale » à Nice et à un attentat contre le mess des officiers italiens. Il est arrêté le 22 mai 1943 par l’OVRA (Organizzazione par la Vigilanza e la Repressione dell’Antifascismo) sous le faux-nom de Michel LEMERCIER, incarcéré à la prison de Nice puis envoyé en Italie.

[DAVCC 21 P 448 364]
[DAVCC 21 P 448 364]
[DAVCC 21 P 448 364]
[DAVCC 21 P 448 364]

Fiche de Samuel FAINSTEIN [Fichiers Préfecture Police Paris Individuel Adulte F9/5640]

Fiche de Samuel FAINSTEIN [Fichiers Préfecture Police Paris Individuel Adulte F9/5640]

Il est interné à Drancy le 01 décembre 1943 sous le matricule 9652 .

Fiches d’internement du camp de Drancy [Archives Nationales, F9/5690]

Il y rencontre Serge SMULEVIC qui devient son ami qui raconte les circonstances du départ du convoi :

« 

LE PETIT COUTEAU

17 décembre 1943,  vers midi.

Nous venons de quitter Drancy et nous sommes alignés sur le quai de la gare de Bobigny. Je suis au premier rang, entre mes deux meilleurs amis. A ma gauche, Maurice Fainstein, dit Momo, de Montreuil-sous-Bois, et à ma droite François Sandler de Lyon. Devant nous, un train de marchandises, et tout le long des soldats S.S. armés de mitraillettes. Puis, nous voyons arriver, marchant lentement, Aloïs Brunner, suivi de deux officiers S.S.
Je l’avais déjà vu à Drancy où j’ai passé environ quinze jours. La nuit précédente, dans l’immense salle dans laquelle nous dormions pour la dernière fois à Drancy, pêle-mêle hommes, femmes et enfants, une jolie
jeune femme blonde, vêtue d’un manteau de fourrure qui était installée à proximité de notre groupe, se leva vers minuit. Elle nous dit que Brunner l’attendait dans son bureau, et lui avait promis de ne  pas faire partie de ce convoi, elle et sa mère. Elle est revenue, deux heures plus tard, en sanglotant. Le lendemain, elle était sur le quai avec sa mère.
Donc, Brunner nous tient un discours, traduit instantanément par un civil, pour nous avertir que si quelqu’un tentait de s’évader, tous les autres occupants du wagon seraient exécutés. De même il nous avertissait qu’il était interdit d’emporter dans ses bagages tout couteau ou autre objet pointu en métal, permettant éventuellement d’attaquer le plancher du wagon, et qu’il était encore temps de les remettre spontanément. Et il se mit à ouvrir au hasard, des bagages et sacs à provisions. Il s’arrêta devant mon ami Français Sandler, se pencha et ouvrit son sac et se mit à le fouiller. En. sortit un petit couteau à éplucher des pommes de terre. Se releva, un sourire sarcastique aux lèvres et approcha le petit couteau des yeux de mon ami François, allant à toute vitesse d’un oeil à l’autre, comme s’il allait les lui crever. Et tout à coup, d’un geste précis et rapide lui trancha plus de la moitié de l’oreille gauche, et remit le couteau à l’un des deux sbires qui l’accompagnait. Le sang dégoulinait abondamment sur le côté gauche de François, mais personne n’osait bouger, et quelques instants plus tard nous sommes montés dans le wagon. Bien sûr dès que le train partit, on enmaillotta l’oreille de François dans un morceau de chemise. L’image de cette oreille qui pendait, je n’ai jamais réussi à l’oublier.

François n’a pas tenu très longtemps à Monovitz, où il est mort après son admission au KB. Mon ami Maurice Fainstein, qui avait fait sauter le local de Jacques Doriot à Nice, et avait pratiquement été arrêté par la foule, avait été emprisonné avec moi à la prison de Nice, où nous avons passé trois mois ensemble. Il est mort de faiblesse, dans mes bras, totalement épuisé, au courant du mois de mai 1944. Sa soeur m’a écrit plusieurs fois, après mon retour à Thionville, ainsi que la femme de François. Je possède toutes leurs lettres, mais rien n’était aussi pénible que d’annoncer à quelqu’un la mort d’un proche dans un camp. D’autant plus pénible que ces personnes voulaient des détails sur cette mort, espérant toujours que je pouvais peut-être me tromper, et cet espoir qui ne les quittait pas, me mettait dans un état lamentable.
Déjà le leur dire était difficile, mais presque exiger de moi des détails était au-dessus de mes forces, car les images que j’ai conservées des derniers moments de Momo étaient douloureuses. Il avait tellement maigri, et ses yeux, à travers ses lunettes rafistolées avec du fil de fer, étaient si remplis de tristesse que c’était difficilement supportable.

Voilà comment sont partis, pour ne plus revenir, par le convoi n° 63, mes deux derniers amis, venus avec moi sur ce quai de la gare de Bobigny, pour assister à cet acte de sauvagerie barbare d’Alois Brunner.
Ils sont toujours présents dans ma mémoire.
« 
Serge SMULEVIC

source : http://d-d.natanson.pagesperso-orange.fr/serge_petit_couteau.htm

Il sera déporté par le convoi numéro 63 au départ de Drancy le 17 décembre 1943 à destination d’Auschwitz.

Liste convoi n°63 [CDJC, Mémorial de la Shoah, Paris]
Liste convoi n°63 [CDJC, Mémorial de la Shoah, Paris]

Il est enregistré dans la partie concentrationnaire du camp sous le matricule 169786 et est affecté au camp de Monowitz (Buna) le 01 février 1944. Il fait des séjours à l’infirmerie de Monowitz du 1er février au 1er avril 1944, du 03 avril 1944 au 08 avril 1944 et du 14 avril au 30 avril 1944. A cette date, il est renvoyé sur Birkenau. Maurice FAINSTEIN est décédé en mai 1944, à 24 ans,  mort d’épuisement dans les bras de son ami Serge SMULEVIC (parution Journal Officiel de la République Française n°242 du 17/10/1989 page 12972).

Le père de Maurice, Samuel, arrêté le 21 juin 1941 est interné dans une prison à Nantes puis transféré et interné au camp de Compiègne en juillet 1941 sous le matricule 1243. Il est transféré sur Drancy puis déporté par le convoi numéro 32 du 14 septembre 1942. Il a été exterminé à Auschwitz-Birkenau, il avait 50 ans.

Fiches d’internement du camp de Drancy [Archives Nationales, F9/5690]
Liste convoi n°32
 [CDJC, Mémorial de la Shoah, en ligne]
Liste convoi n°32
[CDJC, Mémorial de la Shoah, en ligne]

Anna et vraisemblablement les enfants rejoignent le département de la Gironde à une date inconnue et logent Villa Jean-Marie, Allée du Parc à Arcachon.

Fiches Etrangers Archives Départementales Gironde [44W64]
Fiches Etrangers Archives Départementales Gironde [44W64]

Anna, Fanny et Denise FAINSTEIN ne seront pas déportées. Anna récupère à Paris un certificat d’internement et de déportation, Fanny est mariée avec Monsieur Jean Roger BUSSAT depuis le 29 octobre 1938 (Paris, 12ème arrondissement) résidant à Montrouge 3, rue Arthur Auger et décède à Gardanne (Bouches-du-Rhone) en 1996 et Denise se marie juste après-guerre avec Harry A. WASSERMAN le 06 octobre 1945 à la mairie du 16ème arrondissement à Paris et migre aux Etats-Unis.

Anna effectue les démarches après-guerre auprès du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre afin de régulariser les situations administratives de son mari et de son fils.

Denise WASSERMAN déposera en 1974 une feuille de témoignage sur le site du Yad Vashem en mémoire de son père et de son frère.

Correspondance avec la Kommandantur de Nantes [ADLA 1694W26]