BESSO Maurice, Fortunée, Marc, Nelly, Suzanne, Sonia [138]

[Galerie photo haut : Archives Départementales de Loire-Atlantique]
Marc BESSO : Archives Départementales de la Vienne
[Galerie du bas : Musée de Malines]

Moïse dit Maurice BESSO est né le 10 décembre 1893 à Corfou (Grèce) [Père: Marc BESSO et Mère : Simha BESSO] et est marié avec Fortunée (ou Eutichia) BESSO née le 20 juin 1897 à Corfou (Grèce) [Père : Gabriel BESSO et Mère : Esther ZACHAR]. Le couple a quatre enfants : Marc né le 13 septembre 1919 à Corfou, Nelly Allegra Esther née le 11 septembre 1922, Suzanne Jacqueline née le 12 février 1924 et Sonia Gabrielle Liliane née le 20 janvier 1929, les trois derniers enfants étant nés à Ixelles.

La famille fréquentait déjà la station avant-guerre. Le journal L’hebdomadaire « La Mouette » publie régulièrement avant-guerre la liste des personnes présentes sur la commune pendant les vacances scolaires et Maurice BESSO et sa famille résident à la « Villa la Brasardière » avenue Massenet. C’est d’ailleurs dans cette villa que la famille réside à son arrivée à La Baule en juillet 1939 [La Mouette 9 juillet 1939 p.3] avant de s’installer Villa « Les Petites Buttes » à partir du 15 juillet 1940. Cécile MAERTENS (née le 22 novembre 1909 à Iseghem, Belgique) les accompagnent également (relation amicale, employée de maison ???)

Certificat de résidence de la famille BESSO [ADML 120W58]
Certificat de résidence de la famille BESSO [ADML 120W58]
Villa La Brasardière Avenue Massenet La Baule
Villa Les Petites Buttes avenue d'Alsace La Baule
Villa Les Petites Buttes avenue d’Alsace La Baule

La famille est arrivée en France de Belgique le 18 juillet 1939 par le poste frontière de Quiévrechain (France) avec un visa valable jusqu’au 4 avril 1940 délivré sur leur passeport hellenique par le Consulat de France à Bruxelles. Leur lieu de résidence à Bruxelles est le 132 avenue Franklin Roosevelt.

Maurice, très inquiet de la tournure des évènements peu avant l’entrée en guerre et une éventuelle invasion de la Belgique prévient sa belle-soeur Linda (et ses quatre enfants) et son frère Joseph Michel (son épouse Victoria et leurs deux enfants) et les incitent à venir le rejoindre à La Baule. Le Consul Général de Grèce à Bruxelles Charles GREGOIRE, propriétaire d’une villa à La Baule la villa Aktina (son épouse est propriétaire de l’hôtel des Pléïades) , présent à Nice en 1939, les soutiendra pour que leur séjour soit prolongé après l’expiration de leurs visas.

Maurice BESSO participe à l’entraide des habitants de La Baule envers les réfugiés en participant au fonds de souscription organisé par la mairie qui publie régulièrement dans la presse la liste des donateurs [Le Courrier de Saint-Nazaire et Région, 14 octobre 1939].

L’aînée Nelly est inscrite (à la date de mars 1940) à l’Institut Polytechnique de l’Ouest à Nantes pour y suivre des cours de Chimie [Directeur P. LE ROLLAND] tandis que Marc est inscrit à l’Ecole Régionale des Beaux-Arts à Nantes. Les deux autres filles Suzanne et Sonia sont elles scolarisées dans une école à La Baule (sans précision).

Papier à en-tête Ecole Régionale des Beaux-Arts Nantes
Papier à en-tête Ecole Régionale des Beaux-Arts Nantes

Entre le 27 septembre et le 20 octobre 1940, Maurice BESSO se fait recenser auprès de la sous-préfecture de Saint-Nazaire sous le numéro 138. Juste après, sa belle-soeur Linda et ses trois enfants se font recenser et habitent tout près Villa Martine, Avenue d’Alsace/Avenue de Lorraine à La Baule.

Extrait liste dactylographiée du recensement 08 novembre 1940 [ADLA 1694W25]
Extrait liste dactylographiée du recensement 08 novembre 1940 [ADLA 1694W25]

A l’automne 1941, la zone côtière devient « interdite » aux Israëlites étrangers. Maurice BESSO demande alors à bénéficier d’un sursis d’expulsion qui lui est accordé : « Etant donné l’état de santé de madame et mademoiselle BESSO, le sursis sollicité peut être accordé« .

courrier de la sous-préfecture de Saint-Nazaire au Préfet de Loire-Inférieure du 25 novembre 1941 et 02 décembre 1941 sur le refoulement des israëlites étrangers [ADLA1694W21]

La famille BESSO Maurice quitte La Baule le 07 juillet [ADML 303W290] pour arriver au plus tard le 10 juillet 1942 à Cholet [ADML 7W1].

Contrôle de présence des Israélites [ADML 7W1]

Peut-être a-t-il été prévenu des arrestations à venir. Un déplacement à Cholet une semaine avant la grande rafle des 15, 16 et 17 juillet 1942 dans l’arrondissement de Saint-Nazaire pose question. Bertrand Bossy dans « Histoire de la déportation des Juifs dans les Mauges ; La Crèche : Geste Editions, 2014 ; p. 60″ apporte une réponse : le maire de Cholet, Alphone Darmaillacq, explique en 1946 que la famille BESSO lui a été adressée par un ami de La Baule. …Il m’avait été adressé par un ami de La Baule et il avait à prix d’or frêté un car pour lui et sa famille… [Darmaillacq, A. ; Cholet sous l’Occupation ; Cholet : Imprimerie du Centre, 1946, rééd. 1991 ; pp. 44-45]

L’arrivée de la famille Maurice BESSO ne passe pas inaperçue à Cholet en emmenant avec lui « 17 malles dont une contenant un poste de TSF et de nombreuses caisses » [Bossy, B. ; Histoire de la déportation des Juifs dans les Mauges, op. citée, p. 60]

Enfin, pas d’explications sur le fait que Linda et ses trois enfants ne les suivent pas à Cholet. Ses plus jeunes enfants sont scolarisés à La Baule et la sortie scolaire en 1942 est fixée au 13 juillet. Peut-être a-t-elle attendu la fin des cours pour rejoindre son beau-frère.

Peu de temps après leur départ, une enquête est demandée par le SicherheitPolizei (SD) sur un certain nombre de personnes dont les deux familles BESSO fin juillet 1942.

Commissariat de Police de La Baule [ADLA 1803W107]
Commissariat de Police de La Baule [ADLA 1803W107]

Contrôle de déplacement des Juifs [ADLA 1694W25]

Ils arrivent le 10 juillet 1942 à l’Hôtel de la Poste 30, boulevard Gustave Richard à Cholet. « Mme MERCERON accepta de les loger avec tous les siens jusqu’à ce que les dénonciations multiples eurent alerté les Allemands…. Mais une lettre anonyme signala un jour qu’au moment où les Français devaient s’imposer tant de privations, il était anormal de nourrir des métèques. Je mis cette lettre au panier. Il est probable qu’une dénonciation parvint à la Kommandantur, car quelque jours plus tard cette famille st arrêtée. Nous pûmes aussitôt cacher ses bagages et, par la suite, lui faire parvenir une partie des effets au camp de Drancy. Mme MERCERON, qui se montra courageuse, put même lui faire remettre une partie de son argent. Malheureusement, je ne sais pas ce qui s’était passé à La Baule ; mais l’ami qui m’avait adressé cette famille fut arrêté, ainsi que le propriétaire du car qui avait fait le transport. Quelques jours plus tard, le commissaire aux Affaires Juives vint à Cholet. Il possédait une documentation complète sur la famille BESSO et me demanda ce qu’étaient devenus les bagages. Je lui dis qu’ils devaient être dans une un local que BESSO avait loué près de la gare. Il alla en prendre possession, fit un inventaire et nous laissa un reçu de tout. J’ai su depuis qu’une nièce de l’intéressé avait noué des relations avec un officier allemand d’Angers et sans doute avait parlé, car elle était en mauvais termes avec son oncle. » [Darmaillacq, A. ; Cholet sous l’Occupation ; Cholet : Imprimerie du Centre, 1946, rééd. 1991 ; pp. 44-45 in BOSSY, B. Histoire de la déportation des Juifs dans les Mauges ; La Crèche : Geste Editions, 2014″

La famille est arrêtée dans l’après-midi du jeudi 03 septembre 1942 vers 17 heures puis transférée sur la camp de La Lande à Monts près de Tours .

Le 05 septembre 1942, elle est transférée sur Drancy puis la famille entière sera déportée par le convoi numéro 45 de Drancy à Auschwitz du 11 novembre 1942.

Fiches de BESSO Fortuné, Nelly, Sonia, Suzanne [Fichiers Préfecture Paris Individuel Adulte AN F9/5634 et Fichiers Préfecture Individuel Enfant AN F9/5669]

Fiches d’internement Camp de Drancy [Archives Nationales F9/5680]

Liste convoi 45 [CDJC, Mémorial de la Shoah, en ligne]
Liste convoi 45 [CDJC, Mémorial de la Shoah, en ligne]

La famille de 5 personnes (sauf Marc) a été exterminée à Auschwitz-Birkenau et en l’absence d’informations a été déclarée décédée 3 jours après l’arrivée du convoi.

Marc, l’aîné des enfants, comme indiqué par son père en mars 1940, est étudiant à l’Ecole Régionale des Beaux-Arts à Nantes. Marc quitte sa famille et passe la ligne de démarcation entre mars 1940 et 1941 et va résider à Limoges. Il est inscrit à partir de 1941 [AD86, 44J28] et pour l’année scolaire 1942-1943 à Ecole nationale des Arts décoratifs de Limoges. Il réside alors à l’Hôtel Moderne à Limoges. Son père, lors de son séjour à Cholet, s’inquiète du sort de son fils « Il (Maurice BESSO) venait d’ailleurs presque chaque jour à la Mairie ; il tremblait pour ses enfants, et j’ai pu servir d’intermédiaire pour communiquer avec son fils âgé de 22 ans et réfugié en zone libre » in [Darmaillacq, A. ; Cholet sous l’Occupation ; op. citée]

Ecole nationale des Arts décoratifs (E.N.A.D.) de Limoges : concours mensuels et annuels, prix et notes des jeunes gens et jeunes filles (1941-1947) [Archives Départementales de la Vienne 44J28]

Marc d’ailleurs rejoint un temps la commune de Saint-Raphaël dans le Var (il réside à l’Hôtel Continental) en mai/juin 1941 et s’adresse à la HICEM de Marseille afin de pouvoir migrer aux Etats-Unis. Son père, Maurice, l’a mis en relation avec un ami à lui à New York pour lui faciliter l’obtention d’affidavits nécessaires à la délivrance de billets de passage via paquebot. Malheureusement, les conditions d’entrée ayant changé aux Etats-Unis à cette époque, sa demande n’aboutira pas. [C’est aux parents ou amis aux Etats-Unis de déposer une demande d’ immigration auprès des services d’immigration à Washington avec affidavits, cautions morale et politique et prix du passage à verser et non plus l’inverse auparavant)

En février 1942, il effectue une déclaration auprès des Autorités Françaises.

[Archives Départementales de la Vienne 985W485]
[Archives Départementales de la Vienne 985W485]

Fin juin 1942, Marc est sommé de rejoindre le Centre de Recensement de Limoges au 34, avenue Garibaldi afin d’y effectuer une visite médicale, je cite « pour les oisifs susceptibles d’être occupés dans l’agriculture du 15 juin au 15 octobre 1942″. Nous ignorons si Marc a été employé comme ouvrier agricole dans les fermes de la région de Limoges.

Après l’invasion des troupes allemandes en zone non-occupée début novembre 1942, les juifs étrangers sont expulsés de leurs chambres d’hôtel afin vraisemblablement que les troupes allemandes puissent y loger. Marc BESSO quitte donc sa chambre de l’Hôtel Moderne pour le 26, rue Elie Berthet.

partementales de la Vienne 1517W119]
[Archives Départementales de la Vienne 1517W119]

En janvier 1943, les Israélites étrangers passent une visite médicale afin d’être incorporé dans un Groupement de Travailleurs Etrangers. Marc est déclaré apte et incorpore le Groupement numéro 6 des formations d’étrangers le 18 janvier 1943 groupe n°643 à Aix-sur-Vienne (emploi occupé inconnu) puis à compter du 03 février 1943 au groupe n°528 à Uzerche en Corrèze. Il est détaché à l’usine Brachs à Saint-Priest du 03 février au 07 mai 1943 puis le travail terminé détaché chez Monsieur Serve (lieu inconnu) jusqu’au 1er octobre 1943.

Il part en congé du 12 au 18 juillet 1943 chez Mademoiselle VALLEE à Corrèze (Corrèze) et est déclaré déserteur le 02 octobre 1943.

Fiche d’identité travailleurs étrangers [Archives Départementales de la Vienne 1081W298]

Marc BESSO entre en Résistance sous le nom de Marc DELMAS, membre de l’Armée secrète (AS), du Mouvement de Libération nationale (MLN), groupement Gao. Il fut arrêté, en même temps que Guy BONJOUR, Pierre CHAUMEIL et Pierre FRANCOIS, le 6 juillet 1944 en gare de Brive (Corrèze) par la Sipo-SD pour « tentative de libération d’un camarade emprisonné ».
Condamné à mort par le tribunal du 95e régiment de sécurité de la Wehrmacht le 16 juillet 1944, Marc BESSO a été fusillé le lendemain le 17 juillet 1944 dans la carrière des Perrières près de Brive. Il avait 24 ans.

Dossier d’étranger de BESSO Maurice [ADML 120W58]

Dossier d’étranger de BESSO Nelly [ADML 120W58]

Dossier d’étranger de BESSO Suzanne [ADML 120W58]

Un commentaire sur “BESSO Maurice, Fortunée, Marc, Nelly, Suzanne, Sonia [138]

  1. Venant de mettre de l’ordre dans les archives familiales, j’ai retrouvé une lettre du 17 janvier 1940 adressée au grand père paternel de mon épouse, de Docteur Marcel Meunier (pédiatre des enfants Besso lors de leur séjour à Bruxelles). J’ai été très ému de lire ce qu’il était advenu de la famille Besso.

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