Naftali (ou Naftal) Josef KELLER est né le 01 janvier 1901 à Mostyska (Pologne) et est marié avec Reisel (prénom usuel Rosa) KELLER née GOLDSTEIN née le 21 décembre 1894 à Jaworow, Yavoriv (Pologne/Ukraine). Trois enfants vont naître de cette union : Sara née le 02 mai 1928 à Przemyśl (Ukraine), Irène née le 16 décembre 1929 à Przemyśl (Ukraine) et Michel né le 24 mars 1935 à Belfort (France).
![Acte de naissance de Michel KELLER [Archives Départementales Territoire de Belfort, Etat Civil]](https://shoahpresquile.files.wordpress.com/2019/04/01kellermichelactenaissance.jpg)
La famille est arrivée en 1930 en France mais n’est pas présente à l’adresse de naissance de Michel tant en 1931 et 1936 sur les recensements de population de Belfort.
Naftali KELLER s’est engagé en tant que volontaire étranger le 05 septembre 1939 dans la Légion Etrangère à Belfort.
![Base des engagés volontaires étrangers entre le 1er septembre 1939 et le 25 juin 1940 [Mémoire des Hommes, en ligne]](https://shoahpresquile.files.wordpress.com/2020/05/kellernafatalengagement1939.jpg?w=754)
La famille arrive à Saint-Nazaire (sans date) où elle réside 24, rue du Dolmen (1940). Naftal exerçait la profession de marchand ambulant en confection.
Sara arrivant de Belfort passe son Certificat d’Etudes en juin 1940 à l’Ecole Publique Jean Jaurès à Saint-Nazaire avec des notes brillantes.
Il se fait recenser auprès de la sous-préfecture de Saint-Nazaire entre le 27 septembre et le 20 octobre 1940 sous le numéro 50.
![Extrait liste recensement 08 novembre 1940 [ADLA 1694W25]](https://shoahpresquile.files.wordpress.com/2019/03/kellernaftalrecensement.jpg)
Dans le cadre du processus d’aryanisation, Naftali déclare son entreprise comme juive le 11 novembre 1940.



Le Préfet de Loire-Inférieure tente d’aryaniser le commerce mais Naftali et toute sa famille ont quitté rapidement Saint-Nazaire.
En octobre 1940, les tampons Juif et Juive sont apposés sur les cartes d’identité ou les récépissés.
![Courrier du sous-préfet aux maires des communes et commissaires de l'arrondissement de Saint-Nazaire [Archives Municipales de Saint-Brévin, H13]](https://shoahpresquile.files.wordpress.com/2020/04/amsaintbrevinh13.jpg?w=789)
La famille quitte Saint-Nazaire le 06 décembre 1940 pour Baugé (Maine-et-Loire) puis Saint-Georges-sur-Loire (Maine-et-Loire).
![Changement résidence Israëlites décembre 1940 [ADLA 1694W25]](https://shoahpresquile.files.wordpress.com/2019/03/03deplacementjuifsdc3a9cembre19401694w25-1.jpg)
A Saint-Georges-sur-Loire, la famille KELLER s’installe dans une petite maison de la route de Saint-Augustin, route de Segré aujourd’hui disparue. Dépourvue de ressources, elle vit des allocations pour réfugiés. Le conseil municipal donne avis favorable pour une assistance médicale gratuite pour les enfants en date du 26 octobre 1941… Michel, Sarah et Irène fréquentent les écoles publiques de garçons et filles de la commune et Sarah, par ailleurs, devient apprentie couturière chez Madame LAMBIN, elle-même couturière. Sarah va nouer avec la famille une amitié profonde, solide, indestructible. « Elle faisait les courses tous les jours pour sa famille » se souvient sa camarade de classe, qui déposait le matin le journal chez les KELLER. Même si l’arrivée d’étrangers dans le village a pu susciter quelques interrogations ou méfiances, la famille s’intègre petit à petit : Monsieur KELLER faisait partie de la société de boules du village et les enfants en toute logique se nouent d’amitié avec leurs camarades de classe qui ne l’ont jamais oubliée et ont espéré longtemps les retrouver.
Le 1er juin 1942, un décret du Commandement militaire en France (MBF) impose en zone nord le port de l’étoile de David en tissu jaune portant linscription « Juif » « dès lâge de six ans révolus » pour tous les Juifs « de plus de 6 ans et de nationalité allemande, polonaise, hollandaise, belge, française, croate, slovaque et roumaine ». En contre partie de cette étoile, les Juifs doivent remettre un point textile de leur carte d’alimentation.


Naftali est le premier de la famille à être arrêté.
En 1941 à la demande de Vichy l’administration angevine recherche les étrangers « en surnombre dans l’économie nationale ». De manière très significative l’enquête
aboutit à l’établissement d’une liste d’étrangers qui ont la particularité d’être tous Juifs ! Suit cette explication : « […] Bon nombre d’israélites étrangers expulsés du Morbihan et de la Loire-Inférieure par les autorités d’occupation, ont été répartis dans le département et sont hébergés par le service des réfugiés ; ces étrangers qui sont indigents et qui ne peuvent se livrer à aucun travail continu faute d’employeurs
et d’autorisation des services de la main-d’oeuvre, sont une charge pour la collectivité (12 F par jour en moyenne) et sont de ce fait en surnombre dans l’économie nationale. »
Mais ce rapport est suivi d’une suggestion dont les conséquences échappent – on peut l’espérer – au fonctionnaire du bureau des étrangers : « Leur séjour dans un camp de concentration serait moins onéreux que l’hébergement individuel. J’ai en conséquence l’honneur de proposer à Monsieur le préfet l’internement dans un camp de concentration des étrangers israélites figurant sur la liste ci-jointe… »
Le représentant de Vichy donne suite et, en son nom, le secrétaire général signe, le 18 septembre 1941, un arrêté d’internement au camp de Beaune-la-Rolande (Loiret) visant 8 personnes, dont 6 Polonais, tous des hommes. source : Alain Jacobzone : Les Juifs étrangers en Maine-et-Loire pendant la Seconde Guerre mondiale in Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest Anjou. Maine. Poitou-Charente. Touraine n°109-4 | 2002
Nafatali est donc arrêté à l’automne 1941 puis est déporté par le convoi numéro 5 du 28 juin 1942 de Beaune-la-Rolande vers Auschwitz. Il rentre dans la partie concentrationnaire du camp où il reçoit le matricule 43161. Naftali est décédé un mois après son arrivée le 20 juillet 1942 ou le 21 juillet 1942 à l’âge de 41 ans.
Son épouse et les trois enfants sont arrêtés, sous les yeux des témoins saint-georgeois par des gendarmes le 26 janvier 1944 : Michel dans la cour de l’école rue du Riochet, dirigée par Monsieur Métivier, qui crie et se débat, Irène à l’école dirigée par Madame Poirier, rue des Parements, Sarah dans l’atelier de couture où elle travaillait, effondrée et qui ne comprend rien et leur mère sans doute chez elle puis internés à la prison du Pré-Pigeon à Angers qu’ils quittent le 29 janvier 1944 pour Drancy où ils sont enregistrés le 30. Sarah, la fille ainée des Keller, a jeté une carte du camion qui les emmenait de la prison du Pré-Pigeon à la gare Saint-Laud d’ Angers le 29 janvier. Cette carte est arrivée à Saint-Georges chez les Lambin :

![Fiche internement Drancy de Reizel KELLER [AN F9/5705]](https://shoahpresquile.files.wordpress.com/2019/03/01kellerreizeldrancyf9-5705.jpg)







Ils sont déportés par le convoi numéro 68 du 10 février 1944 de Drancy à Auschwitz. en même qu’ Anja SHAUL arrêtée au moment moment dans le Maine-et-Loire, que Rosa KELLER avait pris en charge à Drancy.
Rosa, 50 ans et ses enfants Sara, 15 ans, Irène, 14 ans et Michel 8 ans ont été exterminés à Auschwitz.
Listes convoi 68 et 5 [CDJC, Mémorial de la Shoah, en ligne]


Death Book of Auschwitz [Yad Vashem, en ligne]
Après-guerre en 1946, une demande de recherche de déportés est effectuée auprès du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre pour tenter de retrouver la famille. Marie DESBOIS (Veuve DESBOIS) de Saint-Georges-sur-Loire obtient ainsi les actes de disparition de la famille. Les mentions Mort en Déportation seront portés sur les registres d’Etat Civil et éventuellement transmis aux Ministère des Affaires Etrangères. Madame LAMBIN également de Saint-Georges sur Loire demandera des compléments d’information concernant la famille en 1998.
Une square porte désormais le nom de la famille KELLER à Saint-Georges-sur-Loire inaugurée en 2007 en présence d’Yves LAMBIN et Serge BRUNEAU, camarades de classe de Michel ainsi que du maire de la commune. Une plaque dans le cimetière rappelle également le fugace passage de la famille à Saint-Georges-sur-Loire.