ROTFARB Sabine (Szosia) (NR) [Abram, Chaja, Wolf, Rywka, Dawid, Fejga, Izaak et Michel]

Sabine (Szosia) ROTFARB est née le 15 juin 1924 à Siedlce (Pologne) et est arrivée en France avec le reste de la famille en juin 1931. En l’état, nous ne pouvons émettre que des suppositions quant à sa présence à La Baule : est-elle venue y travailler pour faire la saison d’été ou fait-elle partie des nombreux réfugiés arrivés en septembre 1939 ?.

Sabine est la petite dernière de la famille. Son père, Abram Jocek né le 04 octobre 1874 à Siedlce (Pologne) est marié depuis le 4 août 1908 à Siedlce avec Chaja HIMELFARB née également à Siedlce (Pologne) le 03 janvier 1882. Outre Sabine, le couple a 6 autres enfants, tous nés à Siedlce : Wolf né le 4 août 1908, Rywka née le 25 janvier 1910, Dawid (David) né le 10 mai 1911, Fejga (Fanny) née le 5 août 1914, Izaak (Isaac) né le 17 juillet 1917 et Michel né le 23 avril 1919 .

En 1936, la famille habite au 69/71, rue de Vanves dans la 14ème arrondissement à Paris (Quartier Plaisance) puis déménagera à une date inconnue au 7, rue des Ecouffés (4ème arrondissement).

L’ainé des enfants, David, en 1941 est marié, habite au 8 rue du Trésor à Paris dans le 4ème arrondissement, exerce la profession de marchand de vins, a un enfant (prénom inconnu) et est entré en France le 26 décembre 1932.
Feiga (Fanny) est également mariée (époux SZELPER).
Izaac (Isaac) enfin s’est marié avec Cypojra (Céline) LEWANDOWSKI depuis le 9 janvier 1940 à la mairie du 14ème arrondissement. Cypojra est née le 22 août 1919 à Varsovie [Père : Moszek et Mère : Ruchla BIRENBAUM]. Isaac signe de sa main l’acte de mariage mais ses parents ne sont pas présents. Izaac exerce la profession de tailleur tandis que son épouse Cypojra est aide-comptable. En 1944, le couple a deux enfants : Léon Michel né le 30 juillet 1940 à Perpignan et Danielle née le 31 mars 1944 à Theys (Isère).

Abram, le père de Sabine, exerce la profession de marchand ambulant en bonneterie. En mai 1941, son stock de marchandises est saisi. Deux administrateurs provisoires ont été nommés en la personne de Louis DARIDAN, 2, rue Saint-Honoré à Paris (1er arrondissement] et LAVERGNE, 25, rue Jean Leclaire à Paris (1er arrondissement]. On apprend dans un rapport transmis par Louis DARIDAN au Commissariat Général aux Question Juives en juin 1941 qu’Abram ne possède que peu de choses à savoir une mallette contenant une douzaine de paires de chaussettes. Il est sommé de cesser toute activité.

Entre temps, un certain Jacques RIDET, 123, rue de La Tour Paris (16ème arrondissement) est nommé administrateur provisoire pour le marché de Charonne et une partie du marché des Grandes Carrières. Il va se retrouver à spolier au moins 300 marchands forains sur les deux marchés. Son épouse, profitant de la nouvelle « mission » de son mari, en 1943, se porte acquéreur d’un fonds de marchand forain (Bonneterie pour Dames de Monsieur SAROS), ce qui est strictement interdit. On apprend enfin qu’en 1945, Jacques RIDET a extorqué des fonds auprès des marchands forains. Plusieurs plaintes seront déposées auprès du Procureur de la République pour entre autre extorsion de fonds ou détournement de fonds, Jacques RIDET ayant « oublié » de verser la somme de 56000 francs à la Caisse des Dépôts et Consignations, ayant encaissé la somme sur son propre compte.

Abram ROTBARB ne peut donc plus travailler et est radié du Registre du Commerce. Jacques RIDET touchera la somme de 200 francs pour son activité d’administrateur provisoire via le Commissariat Général aux Questions Juives pour la spoliation du commerce d’Abram.

Sabine effectue une demande de carte d’identité de travailleur industriel le 12 octobre 1939 auprès de la Préfecture de Loire-Inférieure. Le 12 avril 1940, Sabine se fait contrôler par le commissariat de La Baule. A l’âge de 15 ans, elle devait effectuer une demande de carte d’identité pour étrangers et avait donc quatre mois de retard, passible d’une amende de 100 francs que Sabine va régler. Sa situation va être régularisée.

Elle habite alors au moment de sa demande Villa Marie Madeleine 164 avenue de Paris (actuelle avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny) puis Pension Emeraude, avenue de Chateaubriand à la Baule également.

Elle exerce le métier de vendeuse dans un magasin tenu par Madame Surugue, avenue de la Gare (actuelle avenue de Gaulle) à La Baule.

Sa soeur Fajga (ou Feiga ou Fanny) est également présente à La Baule au moins depuis juillet 1940 (vraisemblablement avant compte tenu du rapport de police concernant Sabine) et une autre soeur est également présente (sans prénom). Elle va occuper un emploi de femme de ménage dans un hôtel réquisitionné par les autorités allemandes.

Sabine quitte La Baule le 25 juillet 1940 et retourne à son domicile à Paris le 25 ou 26 juillet 1940 au 7, rue des Ecouffés dans le 4ème arrondissement à Paris.

Elle se présente le 25 juillet, 25 août, 25 septembre 1940, 29 octobre 1940 auprès de la Préfecture de police à Paris, sous direction des étrangers pour faire proroger la validité de son récépissé de carte d’identité. Ayant fait une demande de carte d’identité de travailleur industriel mais se retrouvant sans emploi, elle doit acquitter pour le 13 janvier 1941 une taxe de 100 francs (pour refaire une carte d’identité de non-travailleur) ou fournir un avis favorable des services de la main d’oeuvre étrangère justifiant donc d’un emploi.

Le récépissé est envoyé le 13 février 1941 par la Préfecture de Police de Paris, service des étrangers à la Mairie de La Baule avec demande de bien vouloir retourner le dossier de demande de carte d’identité.

La mention JUIVE sur son récépissé de carte d’identité a été apposée par  décision du 13 octobre 1940 du chef de l’administration allemande en France jusqu’au mois de novembre 1940.

Elle est arrêtée à son domicile le 16 juillet 1942 lors de la rafle dite du Vélodrome d’Hiver, puis internée sur le camp de Drancy.

Elle est déportée par le convoi 11 au départ de Drancy vers Auschwitz le 27 juillet 1942.

Elle est assassinée à Auschwitz le 01 septembre 1942 [DeathBook of Auschwitz, YadVashem, en ligne]

Extrait du Death Book of Auschwitz [Musée d’Etat d’Auschwitz-Birkenau, en ligne]

Le docteur KREMER qui établit l’acte de décès le 09 septembre 1942 précise que Sabine ROTFARB est décédée le 01 septembre 1942 à 12h40 de mort subite. Johann Paul KREMER est affecté à Auschwitz fin août 1942 jusqu’au 20 novembre 1942 en remplacement d’un médecin absent. Il se livrera à des expérimentations scientifiques dont des injections de phénol dans le coeur, cause probable de la mort de Sabine. Durant son séjour à Auschwitz, il tient un journal analysé et commenté par Maxime STEINBERG en 2009 dont on peut retrouver la traduction à cette adresse : https://phdn.org/negation/steinberg/journal.html

Danielle GOLDSTEIN à Sao Paulo (Brésil) rédigera une feuille de témoignage en mémoire de sa nièce.

Sa soeur, Feïga ROTFARB épouse SZELPER, en 1955, effectue les démarches administratives auprès du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre.

Son frère David est interné à Pithiviers depuis le 14 mai 1941 Baraque 14 répondant au préalable à la convocation du 14 mai 1941 pour examen de situation des Juifs étrangers, rafle appelée « rafle du billet vert ». Beaucoup d’hommes juifs internés dans le camp de Pithiviers entre mai 1941 et juin 1942 travaillent dans et autour de Pithiviers, dans des fermes, à la malterie, la sucrerie, la mairie, la carrière, la menuiserie Saillard ou la métallerie Bouchard… David s’évade de la sucrerie le 24 novembre 1941, échappant ainsi à une déportation certaine.

Son frère Michel né le 23 avril 1919 à Siedlce victime comme son frère David de la rafle du billet vert est interné à la même date soit le 14 mai 1941 à Pithiviers Baraque 12 puis déporté par le convoi n°4 au départ de Pithiviers le 25 juin 1942.

Michel est rentré dans la partie concentrationnaire d’Auschwitz enregistré sous le numéro 42574 mais aucune trace d’archives n’existe le concernant par la suite.

Son frère Izaac né le 17 juillet 1917 à Siedlce est arrêté à la gare de Perpignan où la famille résidait 2 rue du Bocage par le police allemande le 12 mai 1944, envoyé sur Drancy puis déporté par le convoi numéro 74 du 20 mai 1944 vers Auschwitz. Il travaille dans un sous-camp d’Auschwitz, le camp de Blechammer. Le 21 janvier 1945, les hommes valides (4000) évacuent à pied le camp en direction du camp de Grossrosen. Le 21 janvier 1945, la Croix Rouge française est présente dans le camp et dresse la liste des survivants du camp. Izaac n’y figure pas.

Il semble que Cyporja (Céline), son épouse, se soit rendue en Pologne pour retrouver son mari. En août 1945, s’y trouvant toujours et apprenant le retour des déportés en France, elle écrit une lettre au Ministère des Anciens Combattants pour qu’il retrouve trace de son mari. Elle pense que son mari est à Auschwitz (qui a été effectivement évacué le 18 janvier 1945 comme écrit dans la lettre).

Spontanément, Maurice OBREJAN et David ECSTEIN témoignent des derniers instants d’Isaac, mort de faiblesse pendant la marche de la mort.

Sa mère Chaja née le 03 janvier 1882 à Siedlce est internée à Drancy le 5 janvier 1943 puis est déportée par le convoi n°46 au départ de Drancy le 09 février 1943.

Son père Abram né à Siedlce le 04 octobre 1874, interné à Drancy le 11 février 1943, est déporté par le convoi n°49 au départ de Drancy le 02 mars 1943.

Abram avait 68 ans, son épouse, Chaja 61 ans, Sabine 18 ans, son frère Michel 22 ans et son autre frère Isaac 28 ans. Tous ont été exterminés à Auschwitz.

Dossier d’étranger de Sabine ROTFARB [ADLA, 4M924]

En 1946, Céline (Cypojra) belle-soeur de Sabine se marie avec Maurice MERARIU et migre au Brésil avec les deux enfants dans les années 50. Céline décède en 2000 à Sao Paulo et son mari, qui avaient adopté les deux enfants nés de sa première union avec Isaac, en 1980 à Sao Paulo également.

C’est Danielle (la fille de Céline et d’Izaak) épouse GOLDSTEIN qui sera à l’origine des multiples feuilles de témoignage présentes sur le site de Yad Vashem en mémoire de la famille.