BROMBERG Rywka, Wolf, Salomon, Joseph (NR) ; Szyja, Tema, Salomon

Rywka BROMBERG 1939 [ADLA 4M937]

Rywka BROMBERG est réfugiée à La Baule au moins à partir d’octobre 1939 et au moins jusqu’au mois de mai 1940. A l’entrée en guerre en septembre 1939, il est décidé l’évacuation complète des populations civiles des départements d’Alsace Moselle mais également de l’évacuation de tous les enfants des différents arrondissements de Paris. Ceux qui sont scolarisés en écoles primaires sont accompagnés de leurs instituteurs vers la province tandis que les enfants en dessous de 7 ans sont accompagnés de leurs parents (mère uniquement dans quasiment tous les cas) vers la province. Ce qui explique la présence de Rywka et de ses deux enfants à La Baule.

Rywka BROMBERG née HANDELSMAN est née le 17 décembre 1908 à Sterdyń (Pologne) et réside en 1939-1940 Villa Raymonde Suzanne Avenue des Mohicans à La Baule en tant que réfugiée. Elle réside habituellement 35-37, rue de la Folie-Méricourt à Paris (11ème arrondissement). Le tampon « Juive » a été apposée à l’automne 1940. Elle est mariée avec Wolf BROMBERG né le 23 mars 1905 à Sterdyń (Pologne) [Père : Abraham et Mère : Tauba CHMIEL] qui exerce la profession de patron tricoteur dans le 11ème arrondissement. Le couple a deux enfants : Salomon né en Pologne en 1931 et Joseph né en 1936.

Habitent dans le même immeuble, le frère de Wolf, Szyja né le 05 juillet 1907 à Sterdyń (Pologne) marié avec Tema née en 1910 en Pologne et Salomon né en 1932 également en Pologne.

Recensement 1936 quartier Saint-Ambroise Rywka BROMBERG [Archives de Paris, D2M8_592]
Recensement 1936 quartier Saint-Ambroise Rywka BROMBERG [Archives de Paris, D2M8_592]

En décembre 1937, Wolf s’associe avec son frère Szyja et son beau-frère Jankiel ROTBART (marié avec Machla BROMBERG) pour créer une société avec pour objectif l’exploitation d’une fabrique de bonneterie et de tricots située au 225-227 rue Saint-Denis dans le 2ème arrondissement à Paris. La société porte le nom de B.R.B. (initiales des noms des 3 associés).

Les Échos 23 décembre 1937 [Gallica, en ligne]
Le Quotidien Juridique 14 décembre 1937 [Gallica, en ligne]

L’entreprise est située au 3ème étage de l’immeuble au 227 rue Saint-Denis : 2 pièces servent d’atelier et une sert de magasin. Dans l’atelier se trouvent 8 machines et 6 moteurs électriques permettant de les faire fonctionner.

Suite à l’obligation de cesser toute activité commerciale de la part des Juifs, un administrateur provisoire est nommé en la personne de Louis SOULIER 68, avenue de la République à Paris (11ème arrondissement) le 17 mars 1941 qui demande à être assisté d’un mandataire de justice : Marcel DESBANS 41, rue Dauphine à Paris (6ème arrondissement) pour liquider l’entreprise car je cite « Etant donnée la pléthore d’entreprises du même genre et faute d’acquéreur j’ai l’honneur de vous demander l’autorisation de procéder à la liquidation.« 
L’entreprise ferme le 19 avril 1941 et le personnel est licencié dans la foulée.
En juin 1941, il effectue un bilan comptable de l’entreprise et signale les noms des associés où il précise : Wolf BROMBERG convalescent des suites d’une opération subie le 15 mai 1941. Szyja BROMBERG, actuellement en fuite et Jankiel ROTBART actuellement interné au Camp de Pithiviers depuis le 13 mai 1941. Quelques erreurs sont à signaler : c’est Szyja BROMBERG qui est interné à Pithiviers et Jankiel ROTBART qui est en fuite.
Wolf BROMBERG, contraint et forcé de vendre son entreprise, va utiliser tous les moyens qu’il a à sa disposition pour entraver le plus possible la vente.
Le 12 juillet 1941, n’ayant pu récupérer les clefs des locaux, Louis SOULIER fait appel au commissaire de police du 11ème arrondissement, quartier Saint-Ambroise pour se faire remettre les clefs par Wolf BROMBERG. « Cette remise s’est effectuée sans incident et procès verbal a été dressé au Commissariat passage Bellay« .
Le 12 septembre 1941, lors de l’expertise des machines, Louis SOULIER s’aperçoit, via l’expert, que deux pièces importantes nécessaires à leur bon fonctionnement sur les deux machines qui ont le plus de valeur sont manquantes. Interrogé à ce sujet, Wolf répond qu’il les a enlevées pour les faire réparer chez un mécanicien et qu’il allait les rapporter…. Louis SOULIER n’est pas dupe : « Je me rends compte que cette manoeuvre constitue une tentative d’obstruction et qu’elle a été préméditée…« .
Wolf est par ailleurs très prudent : il loge dans un endroit pour lequel il ne veut pas communiquer l’adresse et il ne correspond avec Louis SOULIER que par lettre déposée chez sa concierge et c’est son épouse qui récupère le courrier pour transmission en retour.
Enfin, Wolf lors de sa fuite en zone non-occupée en novembre 1941 a emmené avec lui tous les livres de comptabilité ce qui ne va pas faciliter la tâche de l’administrateur-provisoire.
Le matériel est vendu en janvier 1942 à la SARL Bougain & Salmon 341 rue des Pyrénées à Paris (20ème arrondissement) pour la somme de 215000 francs.
Pour les Juifs français, les sommes sont versées sur un compte bloqué à la Caisse des Dépôts et Consignations. Pour les Juifs allemands ou originaires des pays annexés (dont la Pologne), les sommes sont versées à la Barclay’s Bank sur le compte de la Treuhand und Revisionsstelle. Par ailleurs, français ou étrangers, une somme équivalent à un mois de commission du commissaire-gérant est également versée sur le compte de la Treuhand und Revisionsstelle.
Ainsi, pour l’entreprise B.R.B., le produit de la vente (matériel compris) s’élève à 296000 francs. Une somme de 3400 francs est versée à la Barclay’s Bank au titre du mois de commission du commissaire-gérant, Louis SOULIER a prélevé sur le compte de l’entreprise 18215 francs (somme calculée en fonction du chiffre d’affaires et du temps passé à la spoliation) pour son propre compte et avant le versement du solde de l’entreprise. Le mandataire de justice Louis DESBANS a également touché une commission (montant inconnu) ainsi que le commissaire au compte (montant inconnu).

En théorie, les Juifs spoliés pouvaient demander une part de l’argent pour servir de subsides après accord des autorités françaises compétentes à savoir le Commissariat Général aux Questions Juives. Dépourvues d’argent, les familles se retrouvent sans ressources et dans une situation pécuniaire catastrophique.
Ce sera le cas pour Tema et Salomon BROMBERG (dont le mari est interné) et pour la famille ROTBART pour lesquelles une mensualité de 2000 francs est accordée. Mais il n’y a aucune trace dans le dossier d’aryanisation des sommes versées… Pour Wolf et sa famille, parti en zone libre, il lui était impossible de revoir un quelconque subside.

Wolf, son épouse Rywka et un de leur fils Joseph sont réfugiés en Lozère dans le petit village de Malzieu-Ville (source familiale) (ainsi que Tema et Salomon selon le témoignage via Yad Vashem) : « Les gendarmes recherchaient aussi un Juif du nom de Bromberg. Lorsqu’ils arrivèrent à son domicile, les femmes de la famille les reçurent et protestèrent bruyamment. M. Bromberg saisit l’occasion pour sauter par la fenêtre de derrière. Les gendarmes le virent-ils? Quoi qu’il en soit, personne ne chercha à l’attraper. A la suite de ces événements Marcellin Cazals déclara à ses supérieurs : « Il n’y a pas de Juifs à Malzieu ». Victime d’une dénonciation anonyme, il fut longuement interrogé sur ses liens avec la résistance mais réussit à convaincre » https://yadvashem-france.org/dossier/nom/5805/ . Selon ce témoignage, Marcellin CASZALS a protégé la famille BROMBERG et également d’autres familles juives présentes dans la commune ou alentours. Il sera nommé Juste parmi les Nations par l’Institut Yad Vashem en 1993.

Szyja, le frère et associé de Wolf est au moins interné à Drancy à compter du 22 août 1941 à priori après un contrôle d’identité où Szyja est dépourvu de carte d’alimentation (et du tampon Juif censée s’y trouver). Aucune fiche sur son internement à Pithiviers comme suggéré dans le dossier d’aryanisation n’a été retrouvée. Sur les fiches de Drancy, il est noté qu’il est marié avec deux enfants, le prénom du deuxième enfant est inconnu. Il loge à Drancy Bâtiment 5, Escalier 20, chambre 11. Il est transféré pour une raison inconnue et à une date inconnue vers le camp de Compiègne.

Szyja est déporté par le convoi n° 2 de Compiègne vers Auschwitz le 02 juin 1942.

Liste convoi 2

Szyja est rentré dans la partie concentrationnaire d’Auschwitz et y a été immatriculé sous le numéro 38289.

Fiches Entrée Auschwitz [ITS Bad arolsen : https://collections.arolsen-archives.org/en/document/130582353]

Sur une des fiches de Drancy, il est indiqué DCD juillet 1942 (rempli après-guerre). Szyja est en fait décédé le 13 août 1942 selon le Death Book of Auschwitz. Il avait 35 ans.

Une demande de reconnaissance de statut de déporté politique sera déposée auprès du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de guerre (dossier n° AC 21 P 430 887 non consulté).

Aucune information retrouvée pour Jankiel ROTBART, le troisième associé.

Dossier d’étranger de Rywka BROMBERG [ADLA 4M937]

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